« Il me sera difficile de raconter la suite de cette histoire. D’ailleurs je ne sais pas si c’est bien une histoire. On hésite à appeler « histoire » une telle… accumulation et dissolution… continuelle… d’éléments… »
– Du Cosmos de Witold Gombrowicz
Kosmos se déroule dans le couvent du Gesù à Bruxelles, où environ 250 personnes, dont de nombreuses familles Roms d’origine slovaque, se sont réfugiées jusqu’en novembre 2013. Ruben Desiere y tournait un film, basé sur le roman Cosmos de l’écrivain polonais Witold Gombrowicz, avec la participation d’une partie des occupants. Pendant le tournage, l’expulsion des occupants devient de plus en plus probable. Le film se concentre sur la famille de Kevin Mroč, qui a habité au Gesù pendant 3 ans, et sur deux nouveaux arrivants, Mižu Balázs et Rasto Vaňo.
« Ruben Desiere signe un premier long métrage troublant, où fiction et réalité se confondent habilement, apportant ainsi un autre regard sur le célèbre squat le Gesù. fragments de leur vie quotidienne: la solidarité entre habitants, les chaleureuses soirées familiales autour d’un verre ou le désarroi du père face à l’absence de travail et de perspective. Mais l’inéluctable arrive vite, trop vite. L’expulsion est immédiate, on se presse pour trouver un refuge à quelques meubles, on sauve les vêtements chauds pour affronter l’hiver. Desiere, lui, est toujours aussi proche de ses personnages mais le dispositif a changé, bousculé par l’urgence du réel. Les forces de l’ordre pénètrent dans le lieu signifiant la fin du Gesù et à la colère désespérée du père répond le calme du fils. Décrivant Cosmos, Gombrowicz disait que c’était “un roman sur la formation de la réalité”. Si la fiction finit par disparaître devant le réel, Kosmos mêle adroitement ces deux éléments comme dans cette scène où, après avoir découvert le cadavre du plus urbain des volatiles, Kevin s’interroge: “Pourquoi ont-ils fait ça? Pourquoi ne nous laissent-ils pas tranquilles ? »
Léon Dupont